Chronique : Le bureau fertile, design, végétal et convivial

Pierre, aujourd’hui, nous nous arrêtons sur les plantes au bureau. Ensemble, nous allons expliquer pourquoi nous avons besoin de plantes et comment allier design et végétal sur son lieu de travail. Pourquoi aimons-nous autant les plantes ?

Les plantes aident à répondre à un penchant naturel pour le vivant, que l’écologue Wilson appelle biophilie. L’amour du vivant, littéralement serait, d’après lui, universel.

Que nous apportent les plantes sur les lieux de travail ?

Comme dans toute notre vie, le végétal favorise notre santé. La santé est définie non pas comme l’absence de maladie mais un état de bien-être complet. La présence de plantes dans les environnements de travail favorise la concentration, la performance individuelle et la cohésion. On note par exemple une réduction de ce que l’on appelle les troubles mineurs, comme les picotements de la gorge, les maux de tête. Et pour cause : le végétal, en réalisant la photosynthèse, rejette de l’eau et humidifie l’air. Ce qui est très utile dans des bureaux asséchés par le chauffage ou la climatisation.

Les plantes sont donc en capacité de résoudre bien des problèmes ?

Attention, ce n’est pas une panacée. On parle souvent de qualité de vie au travail. Comme le rappelle bien Actineo, l’observatoire de la qualité de vie au bureau, l’environnement de travail a en effet une influence significative sur la « QVT ». L’aménagement des espaces et les services fournis aux collaborateurs n’ont cependant d’impact que si la mission confiée aux collaborateurs correspond à leurs aspirations et leurs compétences et que si les modes de management sont en cohérence avec les valeurs affichées. Nous parlons de bureau fertile, pour exprimer le fait que le végétal accompagne la croissance des échanges entre les collaborateurs et leur bien-être individuel. Fertile, cela veut dire « qui a la capacité de faire croitre ».

Il y a près d’un an, vous nous parliez de l’engouement pour le contact avec la nature, au bureau mais aussi à la maison. Alors que le port du masque au bureau n’est plus obligatoire depuis lundi 14 mars, ce besoin de nature est-il toujours aussi fort ?

Plus que jamais ! Les Français veulent du vert, y compris au bureau, comme le montrent les études de la chaire Workplace de l’Essec. 7 salariés sur 10 aimeraient que le retour au bureau soit l’occasion de changements dans l’organisation des espaces. Après autant de temps à travailler de chez soi, beaucoup souhaitent retrouver de la convivialité et une forme de chaleur dans leur espace de travail.

Quels sont les enjeux liés au retour au bureau, pour les entreprises ?

Les enjeux sont multiples et le jardinier-paysagiste peut agir sur certains leviers. Les entreprises doivent proposer des espaces attractifs. Le végétal dans les intérieurs participe de l’embellissement des bureaux, sans en changer la structure. Le végétal étant un critère de choix entre deux postes comparables, c’est un levier de marque employeur, d’attractivité, dans un certain nombre de secteurs où il est difficile de pourvoir les emplois proposés. Il y a aussi un enjeu de sociabilité. Certains space planners estiment qu’il va y avoir un renversement dans l’usage des espaces de bureaux. Ils considèrent que jusqu’à présent, 70 % des surfaces étaient consacrées au travail individuel et seulement 30 % au travail collaboratif. Le rapport pourrait s’inverser, et ce très vite, avec 70 % des espaces dédiés aux échanges et au travail en commun et non plus isolé. En intérieur, mobiliser le végétal peut être fait rapidement et de manière modulaire. Il faut dire enfin qu’un enjeu clé est de créer du lien, au service de la créativité. 80 % des idées innovantes naissent en effet d’interactions, d’échanges entre personnes et non derrière un ordinateur !

Comment mieux intégrer le végétal sur le lieu de travail ?

Ça commence par la conception. Intégrer le végétal à l’architecture est autant une question d’usages que de forme et d’esthétique. On parle de design et même de design biophilique. Plus simplement, il s’agit d’inviter et d’imiter le vivant de la meilleure manière possible. A la suite des travaux de l’écologue Wilson, des architectes d’intérieur et des designers américains ont défini 14 principes de design biophilique. Concrètement, le paysagiste d’intérieur va interroger l’entreprise sur ses valeurs, les évolutions dans son organisation, les codes esthétiques qu’elle mobilise. Et il va composer un véritable paysage d’intérieur.

Vous souhaitez nous parler du bureau fertile, un concept signé Les Jardins de Gally. Qu’est-ce que c’est ?

Le Bureau fertile® vise à maximiser le contact avec le végétal, au bureau. Le concept rassemble 3 dimensions :

• Des vues sur l’extérieur (une forme d’architecture la plus transparente possible)
• La présence de végétaux au contact des collaborateurs (plantes grimpantes le long de la structure, arbre inclus dans un bureau, chemin de table planté de végétaux aromatiques, etc.)
• Un ensemble de dispositifs permettant de travailler et de se réunir en extérieur (bureau, connexion additionnelle suivant les cas)

Le bureau fertile reprend les codes d'une serre, pourquoi ?

La figure de la serre est pour nous à la fois symbolique et efficace. La serre, c'est le lieu le plus favorable à la croissance des plantes, en particulier dès leur plus jeune âge. Au travail, c'est là que l'on peut faire naître des idées créatives et des liens féconds. C'est un cocon, un toit sous lequel s'abriter, se sentir bien, entouré. Certaines entreprises choisissent la forme de bulles de nature. On pense notamment au siège d'Amazon inauguré en 2018, avec ses bulles transparentes plantées. La serre laisse passer la lumière et cela, c'est très important.

Pourquoi ?

Parce que l'accès à la lumière est un des premiers facteurs de bien-être en entreprise. Or, bien des bureaux sont relativement pauvres en lumière. Ajouter des modules dans les bureaux qui occulteraient un peu plus la lumière seraient un contresens. Pour pousser, les plantes ont besoin de lumière. Le bureau fertile est une structure transparente, vitrée ou non, qui maximise l'accès à la lumière. L'ajout de lampes au look industriel, de lampes d'un blanc chaud, accentue la luminosité. Pour les plantes, en cas de déficit, il est possible d'ajouter des lampes qui éclairent en stimulant la photosynthèse, avec des longueurs d'onde spécifiques.

On dirait aussi une maison, non ?

En effet, la forme de la serre rappelle aussi l'architecture d'une maison, simplifiée à l'extrême. Elle est très simple, comme une maison dessinée spontanément par un enfant. Cette simplicité permet de l'adapter à tous types d'environnement de travail.

Pourquoi est-ce important, de pouvoir adapter cette structure ?

Parce que la ville de 2050, horizon clé dans les projections climatiques, est déjà là, pour 80 % des bâtiments. L'immobilier connaît actuellement une évolution majeure, si ce n'est une révolution. L'apogée de l'immobilier dit tertiaire, l'immobilier dédié uniquement aux bureaux, est passée. Le réemploi des surfaces, la reconstruction sur des espaces existants est une nécessité écologique et économique. Le bureau fertile est une structure très simple, modulaire, qui se monte et se remonte facilement, pour accompagner la recomposition d'une surface, le déménagement d'une entreprise, etc. Les plantes sont cultivées dans des pots et des bacs qu'il est possible de déplacer et de réemployer. Venons-en aux plantes, justement.

Que trouve-t-on dans le Bureau fertile ?

C'est essentiel, les plantes. C'est la composante clé du Bureau fertile. On trouve un peu de tout dans le bureau fertile. Il s'agit de jouer sur les hauteurs, pour imiter au plus près un environnement naturel. On trouve donc des arbres, comme les palmiers que sont le Kentia ou l'Areca. Ces deux arbres aux feuilles finement découpées se ressemblent beaucoup. L'Areca se distingue par des tiges virant du vert au jaune. On retrouve aussi une plante star des intérieurs, Ficus lyrata, avec ses larges feuilles, comme des pâtes d'ours. Longtemps, cet arbre a été oublié, délaissé. Chez les plantes aussi, la mode est cyclique, un éternel recommencement. On trouve aussi des lianes. Ma préférée, vous les savez, c'est le Monstera, Philondeneron monstera et son cousin Philodendron xanadu, aux feuilles comme des palmes. Il y a des plantes au sol de taille moyenne, comme des Zamioculcas, une super héroïne de nos intérieurs, grâce à ses tiges renflées, dont nous avons déjà parlé ici. Il y a aussi des Aloe, plantes grasses de la même famille que l'Aloe verra aux propriétés cosmétiques ou encore pour fabriquer la Téquila. Il y a aussi le Calathea, dont le dessous des feuilles est de couleur bordeaux. On trouve également des plantes suspendues, comme le Scindapsus, ou Pothos, aux feuilles vert tendre en forme de cœur. N'oublions pas le chlorophytum, aux feuilles comme de larges bande d'herbe à chat, vert tendre rayées de blanc. On attribue bien des vertus à cette plante, comme celle de participer, sous certaines conditions, à l'amélioration de la qualité de l'air. Pour la multiplier, chez vous, c'est assez facile : coupez un petit rejet et placez-le quelques jours dans l'eau. Il y a également des plantes retombantes dont le dessous des feuilles est rouge, comme Tradescantia zebrina.

Quelle est l’actualité du Bureau fertile ?

Le Bureau fertile est présenté pour la première fois à Maison & Objet, à Paris, le principal salon de design en France.

Et après ?

C’est le printemps et les beaux jours arrivent. Tous au jardin ! Le bureau se prolonge vers les extérieurs, avec le Bureau fertile version extérieure, mais aussi les potagers, l’accueil de la biodiversité, y compris en entreprise !