Dans cette nouvelle chronique, évoquons la diversité et le fonctionnement du végétal et découvrons aussi tous les bienfaits qu’il nous procure, y compris pour notre santé.

Aujourd’hui, Pierre, vous nous parlez de remèdes. C’est vrai que vous avez une petite voix.

Oui, je suis enrhumé. Je vous passe les détails sur le nez et la gorge. C’est un p’tit rhume de rien du tout. Mais comme nous sommes à la radio, je ne peux pas vous le cacher, ma voix me trahit. Vous me direz, le dicton nous prévient : « en avril, ne te découvre pas d’un fil ». Mais avec ce beau temmmps, comme on dit dans ma Loire natale, avec des températures qui jouent au yoyo, ça n’est pas très étonnant. Je vous propose donc une chronique « de rien du tout, qui vaut même pas trois francs six sous », comme le chantait Mickey 3d, alias Michael Furnon, lui aussi natif de la Loire. C’est un morceau de l’album « Tu vas pas mourir de rire », paru en 2003, qui a fait connaitre largement le groupe avec le titre, toujours pleinement d’actualité, Respire. Car oui, il y a aussi de la musique et un peu de chauvinisme dans cette chronique SOS, car ça ne fait pas de mal pour se remettre sur pied !

 

Quelles plantes et productions du jardin peuvent nous aider à vaincre les virus d’un printemps capricieux ?

Pour calmer le rhume, le thym est tout indiqué. Il va aider à atténuer les symptômes. Cette chronique m’a servi de prétexte pour rouvrir « Le livre des bonnes herbes », de Pierre Lieutaghi, ethnobotaniste de grand renom, disparu il y a peu. A propos du thym, le botaniste cite notamment Peyrilhe, un chirurgien français connu comme un précurseur des recherches contre le cancer et qui écrivait en 1804, je cite : « plante très active ; moins utilisée en médecine qu'elle ne devrait l'être ; sans doute parce que l'idée de condiment semble exclure celle de médicament ». Pierre Lieutaghi précise, je cite : « [qu]’il importe de récolter le thym au moment où il est particulièrement riche en principes actifs, c’est-à-dire à la floraison, en avril-mai ». Ça tombe bien !

Quelles sont les vertus médicinales du thym ?

Lieutaghi toujours nous dit entre autres que c'est un antiseptique et un expectorant « recommandé dans la bronchite, la toux, les rhumes et la grippe dont c'est l'un de nos meilleurs remèdes végétaux ». Le principe actif est appelé thymol. Certains thyms, comme le thym rouge sont particulièrement riches en cette substance. Lieutaghi recommande de prendre une infusion de thym. Elle se prépare à la dose d'une cuillerée à dessert de feuilles sèches pour une tasse d'eau bouillante. Il préconise 3 tasses par jour. Et il précise, comme pour le thé d’ailleurs, qu'il convient d'éviter l'ébullition de l’eau qui altère l'arôme en évaporant l'essence de thym. Et ce n'est pas tout, le botaniste suggère même de remplacer pour un temps le thé ou le café matinaux par une tasse d'infusion de thym, qui serait très utile pour tenir une matinée durant sans ressentir les effets de la faim.

Et dire que l'on considère encore souvent le thym comme une plante de peu d'intérêt, souvent séché, négligemment pendu dans la cuisine ! C’est une vraie redécouverte. Pierre, que faire pour le mal de gorge ?

Pour calmer le mal de gorge, c’est très simple. Il vous faut… des centaines de milliers de fleurs.

Comment faire ? Tout le monde n’a pas la chance de vivre entouré d’autant de végétaux. Et si l’on se met à cueillir les platebandes de la commune, on risque une amende ! Je ne vous parle même pas du nombre et de la taille des vases qu'il faudrait !

Qui vous parle de cueillir des fleurs ? Même si cela fait du bien au moral, si vous le faites de manière raisonnable. Non, le meilleur moyen de bénéficier d’un concentré de fleurs, c’est de manger du miel. Mais je ne suis pas sûr que l'on se rende bien compte de la quantité de fleurs et de travail qu'il y a derrière chaque cuillère de miel. On estime qu’il faut toute une vie de labeur d’une à 12 abeilles pour produire une cuillère à café de miel, soit 10 à 12 grammes de miel. Certains font le calcul suivant. Une abeille revient de sa tournée avec 75 mg de nectar. Ce dernier perd 2/3 de l'eau qu’il contient pour se transformer en miel. 2/3 de 75 mg, cela fait 25 mg de miel. Pour fabriquer 1 cuillère à café de miel, soit 10 g de miel, autrement dit 10 000 mg, l'abeille devra aller 10 000 / 25 = 400 fois butiner. On estime que ce sont 400 000 fleurs qui sont butinées pour une cuillère à café de miel. Rien que cela devrait adoucir votre gorge mais aussi les mœurs environnementales. Si vous ajoutez une cuillère à café de miel dans votre tisane - c'est d'ailleurs à nouveau ce que préconise Pierre Lieutaghi - ou, comme le faisaient mes grands-mères, dans du lait chaud, alors là, votre gorge sera calmée et vous serez comblé.

Voilà 2 produits du vivant plutôt communs et faciles à trouver. Y a-t-il d'autres plantes remèdes ?

On peut citer la menthe poivrée qui permet de soulager la toux et de dégager les voies respiratoires. Il y a aussi la camomille, qui a des propriétés anti-inflammatoires et apaisantes ce qui permet de soulager la gorge et de favoriser le sommeil, parfois en pointillé lorsque l'on est enrhumé. Mais avec votre question, vous me tendez une perche. J'ai envie de répondre « toutes les plantes sont des remèdes » puisque vivre à leur contact, c'est documenté, nous apaise. Nous sommes comme elles des êtres vivants. Avant même d'être des chasseurs puis des éleveurs, nous les humains, nous étions des cueilleurs. Nous avons, et c'est documenté là aussi, un rapport particulièrement apaisé et apaisant avec le végétal. C’est pour cela aussi que, comme Candide de Voltaire, je vous conseille de cultiver votre jardin : au sens propre, mais aussi figuré, de cultiver le monde pour le faire progresser.

Que nous recommandez-vous pour connaitre et utiliser au mieux les vertus médicinales des plantes ?

Attention, comme pour d'autres produits vivant tels que les champignons, lisez des ouvrages de référence si vous voulez pleinement bénéficier des propriétés médicinales des plantes. Certaines sont toxiques ou peuvent l’être si on en prend de trop fortes doses ou qu’on les emploie mal. Les vertus des plantes pour soulager les symptômes ne traitent d’ailleurs pas des causes, notamment du système immunitaire qui, parfois affaibli, est plus sensible aux virus. Rien de remplace le contact d'un professionnel de santé si vos symptômes persistent. Pour progresser dans vos connaissances des formidables vertus des plantes, j vous recommande « Le livre des bonnes herbes » mais aussi « Le livre des arbres arbustes et arbrisseaux » de Pierre Lieutaghi, publié pour la première fois en 1966

et encore publié par Actes Sud ou encore, pour donner aussi une touche gourmande, les ouvrages de notre voisin Suisse François Couplan, qui a longtemps collaboré avec le chef savoyard Marc Veyrat. Lisez et ensuite, sortez, arpentez les jardins publics, visitez des jardins privés et herborisez. Tout ça me donne envie de siffler. Une petite chanson de rien du tout, qui vaut même pas trois francs six sous…

Merci Pierre. En effet, allons herboriser, mettons le nez dehors, cela ne peut faire que du bien. Et vous, soignez-vous bien.